Collection de Bedreskungs

Bon, je me suis inscrit ici y a déjà quelques temps... mais comme j'avais pas de quoi prendre des photos correctes, je me suis retenu. Mais bon comme le père Noël m'a apporté un bel appareil photo, maintenant vous allez y avoir droit !

Donc voilà, mon sujet principal de collection c'est les couteaux de cuisine style "Nogent", "cuisine massive" ou "cuisine à virole" selon les différentes appellations. Très courant à une époque, on les trouve beaucoup moins aujourd'hui. J'ai quelques préférences au sujet de ces couteaux :
- lame en acier carbone,
- soie traversante,
- fabriqués en France,
- et si possible les plus anciens possibles.

Evidemment, beaucoup de couteaux de cuisine comme vous pouvez le voir... j'aimerais bien trouver plus d'offices, par exemple, ou des tranchelards. Les couteaux rouillés en surface ne me dérangent pas, ils sont faciles à rattraper, mais les usés ou cassés, je refuse !

Donc voici l'état actuel de ma collection :



Il y a un peu de tout, notamment des neufs de stock de chez Sabatier K et de Thiers-Issard... mais aussi des pièces plus intéressantes, comme un Tichet, deux de la coutellerie Charles (rue Montorgueil, Paris) et deux Bargoin l'Enclume de tailles assez impressionnantes.

Pour le fun, aussi un peu de taillanderie :



Bien entendu, j'ai d'autres choses, mais ça viendra plus tard

Sont chouettes tous tes cuisines ! Les tout grands notament !

Très jolie collection, particulièrement celui-ci

Tranchelard 28cm, neuf de stock de chez Sabatier K
C'est vrai qu'il est très chouette ! Même si le manche a été mal teint, normalement il était censé être noir uniforme...

un défaut peut aussi être un charme
grâce a un petit truc que les autres non pas

C'est de l'alisier teint façon ébène , dans la collection certains doivent être en ébène , le montage à soie traversante est dit façon Nogent ,c'est le 1° modèle emblématique de couteau cuisine des Sabatier ,c'est les normes d'hygiène et le non passage dans les lave-vaisselle qui les ont retiré du circuit .
C'est tous des modèles forgés de haute qualité  ,d'une souplesse extraordinaire pour les tranchelards ,rare de trouver quelqu'un qui s'y intéresse ,bravo

drassij a écrit:

le montage à soie traversante est dit façon Nogent

Et voilà la réponse à une question qu'on s'était posée, merci Drassij !

Merci pour ces super précisions, drassij !
Oui, je ne connais pas beaucoup de monde qui s'y intéresse, je trouve cela dommage car à l'usage ces couteaux sont vraiment remarquables. Le tranchelard et le couteau à jambon de ma collection (n° 10 et 11 sur l'image suivante), ainsi que le petit filet de sole Thiers-Issard n°3, sont d'une souplesse assez bluffante.

Les couteaux de cuisines sont aussi impressionnants, leur lame est très épaisse au niveau du talon (ça monte à du 8 ou 9mm d'épaisseur sur les plus gros), mais cette épaisseur s'affine très vite pour passer à 2mm environ à la fin du premier tiers ou quart de la lame.
On sent le savoir-faire coutelier qu'il y a derrière, car cette épaisseur importante au niveau du talon (à l'origine faite pour rendre la jonction lame/soie moins fragile, j'imagine ?) rend la prise entre le pouce et l'index très confortable, et la lame très fine sur le reste de la lame permet des coupes très fines et précises. De plus, les lames ont beau être très fines, elles restent bien rigide.
Si on ajoute à ça le fait qu'ils soient tous beaucoup plus légers que les couteaux plate semelle que j'ai eu à manipuler, on obtient les couteaux parfaits à mes yeux ! C'est vraiment dommage qu'ils ne se fassent plus de nos jours, et qu'il soit si difficile de trouver des infos à leur sujet.



Effectivement, les numéros 1, 3, 7, 9 et le petit office central ont un manche en ébène. Les autres sont teints. Le 1 ne possède aucun marquage, le 7 est un vieux Tichet qui a quelque peu souffert (manche réparé, lame corrodée, un peu de jeu) mais qui peut encore servir de longues années. Le 9 est une superbe pièce, c'est un Bargoin l'Enclume dans un état magnifique, qui n'a probablement jamais servi, et c'est aussi le plus gros avec une lame de 33,5cm. Quant aux 3 et l'office, c'est du neuf de stock de chez Thiers-Issard.

La majorité sont montés en soie traversante, mais les deux Thiers-Issard et le grand couteau à jambon 11 ont une soie partielle.

Merci pour vos commentaires dans tous les cas, je suis content de partager ma passion pour ces chef-d'oeuvres de la coutellerie qui sont hélas souvent sous-estimés aujourd'hui !

C'est une bonne observation ,
le cuisinier utilise en principe ce couteau que l'on appelle "couteau de chef" , dans son action il va utiliser la partie près du talon comme un couperet ,le tranchant a de la force derrière ,ça lui permet d'un petit coup de couper un os , d'émincer les légumes ,ensuite plus on remonte vers la pointe il sera possible de trancher ,épais ou fin ,ainsi le cuisinier sans changer d'outil il peut faire une grosse partie de son travail sans perdre de temps , de nos jours le couteau à pleine soie est dénommé "Idéal".

ça me parle tous ces couteaux de cuisine

Quelques gros plans sur les logos des plus anciens de la collection :

Premièrement, le Tichet (n°7), qui est probablement le plus ancien. Tichet était LA marque de couteau de cuisine de luxe de Paris, la coutellerie était au 76 rue Saint-Sauveur. Leur poinçon était le lion (qu'on arrive pas trop à voir ici, j'avoue). La coutellerie a été rachetée ensuite pour devenir la coutellerie André ; mais ils ont apparemment continuer d'utiliser les vieux marquages pour surfer sur le succès de Tichet. Un catalogue des marques de coutellerie datant de 1910 mentionne déjà André comme successeur de Tichet. Pour preuve de la célèbrité de ces couteaux, ils ont été utilisés pour illustrer les articles sur la coutellerie dans le Larousse Gastronomique de 1938, et le chef cuisinier Raymond Oliver les utilisait régulièrement dans son émission "Art et Magie de la Cuisine" (années 50 et 60).



Détail amusant, il existe aussi un marquage sous l'entablure du couteau. Ici, il affiche curieusement "Guyot", autre célèbre marque de couteaux, mais nogentaise cette fois-ci. Je ne sais pas s'il s'agit d'une erreur ou si le couteau a été sous-traité.



Ensuite, le gros Charles (n°8 ici) que je vous avais déjà présenté dans la section avant-après. Il semble qu'il s'agissait d'un gros concurrent de Tichet, un peu moins connu que celui-ci. Ce couteau a aussi un marquage sous l'entablure, celui-ci mentionnant "Charles".



Le logo est étonnamment semblable à celui de chez Tichet, on se demande bien pourquoi !



À noter que le n°6 est un autre Charles, plus petit et avec un marquage plus discret :

Bedreskungs a écrit:

Ici, il affiche curieusement "Guyot", autre célèbre marque de couteaux, mais nogentaise cette fois-ci. Je ne sais pas s'il s'agit d'une erreur ou si le couteau a été sous-traité.

A partir du début 19ème plus rien n'est fabriqué à Paris, sous traitance pour tous les articles.
(edit: on voit même le G.F dans un ovale à côté du poinçon principal, pour Georget, une autre boite nogentaise, étonnant)

Oui, en fait j'étais pratiquement sûr qu'il avait été sous-traité, mais je savais pas s'il avait été sous-traité pour Guyot et envoyé par erreur (ou à cause d'un refus) à Tichet, ou s'il avait été sous-traité par Guyot pour Tichet.

Le marquage sous le talon était peut-être là pour orienter les lames fabriquées aux différents revendeurs, quitte à être relimé par la suite. Le revendeur en recevant les lames y mettait alors bien en évidence son propre poinçon. Ça se tient ?

Ici par exemple, on aurait Georget qui fabrique la lame originellement pour Guyot, et qui y met le "Guyot" sous le talon et son poinçon GF. Ensuite, après une péripétie quelconque, la lame se retrouve chez Tichet, et zou.


Quoi qu'il en soit, si vous tombez sur des Tichet ou des Charles, ou des nogentais, ou alors sur n'importe quel couteau façon Nogent en bon état, n'hésitez pas à me faire signe.

Une nouvelle branche d'exploration dans la collection : j'ai reçu il y a peu ces deux thiernois de marques "Vorex Extra", en style Idéal. Le style Idéal est semble-t-il né de la nécessité de garder certaines caractéristiques des couteaux de cuisine façon Nogent (réduction de l'épaisseur de la lame, entablure, virole transformée en mitre) en y ajoutant la solidité de manche et j'imagine la facilité de montage des couteaux en plate semelle. La source la plus ancienne que j'ai trouvée illustrant des couteaux de style Idéal est le catalogue Georges Archambaud, estimé aux années 40. On peut voir ici la similarité du couteau Idéal avec le façon Nogent en bas et le plate semelle traditionnel juste au dessus. Les rivets, notamment, ne sont pas les rivets de laiton qu'on voit aujourd'hui mais des tiges matées sur des rosettes.



Ces deux couteaux Vorex sont en acier carbone, comme vous pouvez le voir. Le plus grand est sans doute un peu plus vieux, peut-être années 60 ? L'autre est un peu plus récent. Le logo est un peu différent, l'entablure n'est pas pointue mais carrée et de ce fait le fil ne continue pas jusqu'au talon mais s'arrête un bon centimètre plus haut. Les plaquettes ont l'air d'être en hêtre (on voit des "pointillés" sombres très nets) teint au brou de noix, ce qui est assez joli. Elles sont très anguleuses, mais j'aime assez, ça donne une patte un peu ancienne.



Voilà le résultat après un bon nettoyage et un aiguisage pour leur rendre un tranchant digne de leur rang (on voit la fin d'entablure carrée sur le plus petit) :



Et enfin, comme ce détail a une importance tout particulière chez moi, une vue de l'épaisseur, qui nous montre un brusque rétrécissement de l'épaisseur dans le premier tiers de la lame (comme sur les vieux type Nogents) et la semelle amincie :

Intéressant tout ça !
Y nous manquait un spécialiste (oui je sais on n'a jamais fini d'apprendre mais quand même) du cuisine ancien, on doit avoir à peu près un "spécialiste" pour chaque catégorie de coutellerie française ici maintenant  

édit: ce serait dommage que ça s'perde d'ailleurs, à quand un bouquin sur les Chatellerault par Lolo, un sur le Colonial par Papatate ect ?

"Spécialiste" est un tantinet pompeux, disons juste "botaniste attentif du cuisine", si vous me pardonnez cette alliance de concepts un peu saugrenue !

Non, pour être plus sérieux, j'en sais trop peu encore pour me prétendre spécialiste de quoi que ce soit... mais bon, par contre, j'aime apprendre sur le sujet, ça c'est un fait !

+1  


Exposé intéressant pour ces couteaux de cuisine,vu sur tous les angles...
Je peux constater à la maison l'effet des lames top, notamment, le détail au niveau de l'épaisseur des lames(comme le roseau/qui plie et ne rompt pas)
j'ai trouvé deux couteaux en brocante dont un 'Charle' comme ton n°6(photo),  je les ai adoptés pour la cuisine,rien à voir avec ce qui se fait aujourd'hui .
L'autre, c'est un Giroux à Argentan,revendeur de l'époque(1875/1924)

Je suis content de voir que ça vous plaît en tout cas !

Je renchéris sur le distal taper (ou diminution progressive de l'épaisseur) avec des photos vues sur deux anciens couteaux "Idéal", qui ne sont pas à moi, je précise :

Même si ma préférence va pour les couteaux de cuisine nogentais de la période 1900-1930, je ne dédaigne pas non plus les thiernois. Dernièrement, j'ai fait l'acquisition d'un lot de couteaux neufs de stock, probablement récupérés d'un ancien monteur, étant donné que la majorité ne sont pas marqués et que les finitions des lames ne sont pas extraordinaires. Trois en particulier dans le tas m'ont séduit, ils s'agit de deux "couteaux de chef" lames de 18 et 31cm et d'un filet de sole lame de 25cm. Ils ont une ressemblance assez étonnante avec le tranchelard 28cm et le chef 25cm que j'avais acheté l'an dernier sur le site de Sabatier K :



Les manches ressemblent comme deux gouttes d'eau, avec ce côté très carré et le bois nettement plus large que la virole :



Il y a moins de distal taper que sur les couteaux plus anciens, mais il est tout de même bien présent :



Même s'ils sont plus récents (années 50/60, ou même 70 ?) et que les finitions du montage ne sont pas ouf (on voit le ciment-colle qui déborde un peu de la virole...), je leur trouve beaucoup de charme quand même, ils sont légers pour leur taille, et équilibrés franchement sur la lame, ce que j'apprécie. La coupe est bonne, l'aiguisage facile, que demande le peuple ? Bref, deux objectifs concernant ce lot à partir de maintenant :

- Premièrement, dégotter deux couteaux d'office du même montage pour compléter, si j'arrive à en trouver dans les vieilles réserves thiernoises avec un petit lame de 6cm et un grand lame de 12cm, j'aurai un ensemble bien complet à mon goût !

- Deuxièmement, j'aimerais bien "finir" ces lames. Les deux Sabatier K sont polis satiné, les trois autres ont encore des petites rayures qui sont pas homogènes, c'est pas très joli. Faudrait que je trouve quelqu'un qui ait le matos pour me faire un beau poli miroir impec' et homogène sur tout ça.

Bref, une belle trouvaille, et qui plus est pour pas cher !

Très belle collection, ça fait plaisir de voir des gens qui s'intéresse à la coutellerie de cuisine française !
J'essaie en ce moment de fabriquer des lames en me rapprochant au maximum de ce genre de couteaux autant dans les techniques de fabrication et leur forme et dimension.
ce n'est pas évident mais je commence à obtenir des résultats qui me conviennent !
Ici une photo d'un éminceur en 20cm forgé en xc75.
https://i.servimg.com/u/f62/18/16/19/28/dsc_0110.jpg
Je ne m'étale pas plus car ma fabrication n'est pas le sujet du post.

Récemment ajoutés à la collection, deux thiernois sans marquages, style "Idéal" tout forgés d'une pièce. Ils font partie des plus anciens, on peu notamment le voir à la forme des lames (pratiquement triangulaire) et aussi aux rivets qui ne sont pas encore à cette époque les rivets laitons classiques mais des tiges d'acier ou laiton matées sur rosettes. Probablement fin années 40 ou années 50.

Hélas, les deux sont usés et on a du mal à se représenter ce à quoi ils ressemblaient neufs. Je me demande s'il en traîne encore des neufs dans des vieux stocks.

Je les trouve magnifiques ces papys ...

Ils le sont, en plus d'être de très bons couteaux de cuisine !

Chouette acquisition !!

Un petit déterrage pour une trouvaille sympa faite aux puces ce matin pour quelques euros. Une ancienne cisaille à volaille Thuillier-Lefrant, que j'ai prise parce que j'aimais bien sa forme et ses poignées un peu Art Déco :



Grosse manufacture nogentaise de sécateurs, cisailles et autres divers et variés. Après un bon nettoyage je l'ai faite poser avec une autre de la même époque, celle-ci retrouvée dans une armoire de grand-mère chez mes grands-parents maternels, et fabriquée par Guillemin-Renaud, autre grosse boîte nogentaise de l'époque.





Le contre-tranchant, le petit truc qui rajoute :



Et enfin, les deux logos :

Toujours dans l'thème.
Par contre j'ai pas vérifié pour AB, où t'avais chopé l'info ?

Répertoire Annuel des Marques de Fabrique 1920 ou 1911, je sais plus...

Edit: les deux en fait.

Dacodac, du sérieux alors. Bizarre qu'on retrouve pas ce poinçon dans leur doc de l'époque.

Peut-être une filiale ou un ancien indépendant racheté ? Style Guyot qui est rangé dans les "Félix Georget" dans lesdits répertoires...

Les poulets n’ont pas intérêt à flâner dans le coin

Belle prise