Quelques precisions sur le terme ACIER

J’ai publié mon post sur un autre site et j’ai reçus des questions sur la dénomination des différentes finitions des Aciers, je vous fais partager cette réponse.
A plusieurs reprises les mots ; Acier, Acier au Carbone, Fonte, Fer, sont cités. Cela peut créer de la confusion donc je vais donner quelques clarifications :
L’Acier avant le XX ème siècle était défini par son mode de production et non par sa teneur en Carbone, comme c’est le cas aujourd’hui. Contrairement au Fer et à la Fonte, l’Acier ne venait pas de la réduction du minerai. On le préparait par cémentation du Fer en phase solide dans du graphite ou par carburation du Fer dans la Fonte liquide (procédé Chinois) ou par fusion du Fer en creuset avec du charbon de bois ( Damas, wootz, Pulad, puis par procédé Hunttzman).
Vers la fin du XIXème siècle lorsque l’analyse chimique eut pris son essor, on a constaté que ce qui était habituellement appelé Acier avait une forte teneur en Carbone plus de 1%, alors que ce que l’on appelait Fer, produit de la réduction directe du minerai, avait des teneurs très variées en carbone, de 0,05% jusqu’à 0,8% dans un même culot (bloom). La distinction entre Fer et acier était également fondée sur des niveaux de propriétés mécaniques et sur une capacité de “prendre la trempe“.
Les deux termes Acier et Fer n’ont plus la même signification de nos jours. On parle d’Acier, aujourd’hui pour des teneurs en Carbone de 0,05% à 1,9-2%, alors que le terme Fer reste utilisé seulement dans quelques expressions courantes (Fer doux, Fer à béton, fil de Fer, entrefer etc.), mais il représente essentiellement l’élément chimique Fer. Pour la fonte, la définition n’à pas changé, mis à part quelques accident de parcours au XVIII -ème siècle.
La Fonte : Fer avec 2% de carbone au maximum
Il existe également une production de Fer pur avec un acteur sur le marché mondial “AK Steel“ nouveau nom de l’ancienne entreprise ARMCO a l’origine du Fer pur pour des besoins industriels, connue avec le nom de Fer pur ARMCO (99.85%).
Le Wootz et l’Acier Damas étaient des Aciers fondus en creuset, venant d’Inde ou d’Asie centrale et revendus en Perse, puis en Syrie et plus loin vers l’Ouest. Mais aussi des Aciers préparés dans des pays musulmans à partir de vieux fer à cheval et de charbons de bois, plus d’autres “médecines“ ils avaient des teneurs en Carbones typiquement de 1 à 2%.
C’étaient des outils capables d’une grande dureté et avec un tranchant remarquable. Il semblerait que cette technique était connue également des Romains en effet il a été retrouvé près d’un fort situé sur le mur d’Adrien en Ecosse, un gisement d’environ 7 tonnes de clous et autre pièces métalliques enterrées à presque 10 mètres de profondeurs. Les archéologues ont daté ces clous à l’époque de l’abandons par Rome de la Bretagne. Après avoir incendié les fortifications en bois, ils ont enterré les clous de manières à éviter leur utilisation pour en faire des armes après leur départ.
Le mot Wootz, apparu en 1795 en Europe vient vraisemblablement de l’Inde du Sud. L’origine de ce mot est un sujet qui remue des questions sensibles touchant des revendications d’images nationales entre l’Angleterre et l’Inde. Le terme Aciers de Damas est sans doute postérieur aux Croisades. Damas était un lieu de commerce important même si la Syrie n’état pas un producteur d’Acier particulièrement renommé.


Il ne faut pas confondre les termes damasquiner, damasser et acier de Damas.
Damasquiner : Traitement décoratif par attaque acide d’un acier ordinaire avec incrustation de fils d’Or ou autre métal. Le terme complet serait “damasquinage décoratif“ pour décrire cette gravure chimique et mécanique par incrustation.
Damas ou damassé : Ce terme représente différents aspects de la surface du métal, produit soit par corroyage (forgeage) de plusieurs aciers et fers assemblés en paquet, soit par le forgeage d’un seul acier à haute teneur en carbone. Les figures obtenues sont totalement différentes, mais le langage n’à jamais été structuré dans ce domaine dans les écrits du XIX et XX eme siècles ces qualificatifs se rapportent aussi bien au damasquinage décrit plus haut qu’au Damas et Acier de Damas.
Damas de corroyage (pattern welding) : Les lames d’épées souvent appelée en acier damassè sont produites par corroyage, ce sont des lames composites forgées à partir de plusieurs fers et aciers de composition différentes. C’était le cas des lames appelées “Franques“ produites en Europe dont le cœur était torsadé avec des tranchants en acier rapporté. Elles ont été remplacées par des lames homogènes à partir du X -ème siècle. Cette technique extrêmement complexe a été largement mise en œuvre jusqu’au XIX -ème siècle pour la fabrication de canons de fusils.
C’est aussi la méthode portée au summum de la finesse, mise en œuvre dans la fabrication des célèbres sabres japonais.

Damas de cristallisation : C’est l’acier de Damas ; l’acier ondé, obtenu par forgeage d’aciers fondus au creuset tels que le Wootz indien le Fuhlad du proche Orient, terme associé au Poulad des Persans et au Pulad des Russes, Ondanique, Vaines d’acier et d’Aundaine nom rapporté par Marco Polo lors de son voyage vers la Chine mais considéré comme une corruption de Hinduwani/Hindwani c’est-à-dire d’Inde, Indanikossideros en Grec byzantin aussi andanicum en langue Franque.
Il est parfois question de vrai et faux Damas, pour différencier le Damas de Cristallisation et le Damas de corroyage. Ce classement sous forme de jugement de valeur est de peu d’intérêt, car dans un cas comme dans l’autre, le savoir-faire du forgeron mérite le plus grand respect. Mais il est vrai que de nos jours cette façon ancestrale de produire des lames n’est plus essentielle et personne ne met plus en avant les performances de coupe très aléatoire de ces lames mais uniquement leur aspect esthétique, ce sont les lames de corroyage sont les plus proches des lames ancestrales.
A noter la mise sur le marché depuis 2 ans d’un Damas fruit d’une collaboration entre l’entreprise Balbach et SANDVIK Materials Technologie, cette nouvelle matière d’une parfaite qualité de structure et sécurisé par un contrôle parfait du process de fabrication et surtout qui permet d’avoir des lames damassés avec des résultats répétitif.
On raconte que la technique de forgeage des aciers au creuset (Damas de cristallisation) aurait disparu au XVII -ème siècle. Ce qui a permis à certains de clamer qu’ils avaient redécouvert le secret.
Mais en définitive il semblerait plutôt que ce soit une des mines de Fer exceptionnelle que ce soit tarie sans que l’on puisse en trouver la localisation. A noter a ce sujet dans les années 2000 un village en Suède avait été déplacé pour permettre la réouverture d’une ancienne mine de Fer dont la qualité du minerais était exceptionnelle.
Ce qui est vrai est que les méthodes de production actuelles permettent de contrôler lorsque on veut bien s’en donner la peine de produire un Acier performant, durable et surtout reproductible.
Sans rien enlever au mérite et au talent des forgerons qui utilisent de l’acier au Carbone pour fabriquer des lames très esthétiques et qui préservent et reproduisent les techniques ancestrales. J’ai moi-même suivi plusieurs stages de forge, car je pense qu’effectivement c’est un passage obligé pour tout amateur de beaux couteaux de ressentir la chaleur et l’odeur du feu. Par contre j’ai eu beaucoup de mal à faire comprendre, que les techniques actuelles, grâce à la venue des Aciers Martensitiques dont les techniques métallurgiques mise au point depuis une bonne cinquantaine d’année, ont donné des Aciers de coupe sans aucune comparaisons possible avec les Aciers du passé.
Tous les métiers qui ont besoin d’utiliser le taillant d’une lame pour séparer une matière sont aujourd’hui par la force des choses obligés d’utiliser des lames en Aciers Inoxydables car à la fin économiquement ils n’ont pas d’autres choix.
En effet les moyens de contrôle actuels qui permettent de mesurer la force de pénétration, la tenue du fil de coupe, la résistance à la corrosion, la facilité de réaffutage, la ductilité, le contrôle du taux d’Austénite résiduelle pour contrôler la qualité du traitement thermique etc.
Toutes ces techniques se sont affinées au cours des dernières 30 années. Les marchés qui ont été précurseurs on peut s’en douter sont, le milieu médical, car personne ne supporte d’avoir une vilaine cicatrice après une opération chirurgicale. Le marché des lames de rasoirs pour des raisons évidentes, et le dernier en date a été l’industrie agroalimentaire ou une véritable révolution (silencieuse) est en cours en France. Mais depuis de nombreuses années déjà en Allemagne, en Italie et aux Etats Unis, car aussi le coût des maladies professionnelles devenait insupportable. Pour avoir une idée, les forces de pénétration d’une lame peuvent varier de 20 à 60% entre deux Aciers Inoxydables avec des conséquences directe sur les tendons des travailleurs.
Il y a une dizaine d’années personne ne prenait la peine de vérifier la qualité des Aciers dont étaient composée les lames, tous les efforts étaient portés sur les manches et l’esthétique des lames, la qualité de l’acier des lames était comme acquise.
Dans les prochains post, je ferais le lien entre les différentes nuances d’aciers Martensitiques et leurs applications.

A bientôt

En attente de la suite.

Je ne pensais pas le sujet si vaste continue

Quelle érudition, l'ami ! Sujet passionant, vivement la suite...